Dix-huit ans de prison ont été requis, jeudi 21 septembre, contre le rappeur MHD, jugé devant la cour d’assises de Paris pour le meurtre en 2018 d’un jeune homme. La victime avait été lynchée dans le cadre d’un règlement de comptes entre bandes rivales parisiennes.
Après près de trois semaines de débats intenses, l’avocat général a qualifié les faits dont était saisie la cour de «hauts sur l’échelle de la gravité criminologique». Il a ainsi demandé des sanctions sévères pour sept des neuf accusés dans cette affaire.
Dans la nuit du 5 au 6 juillet 2018, Loïc K., 23 ans, perd la vie après avoir été délibérément renversé par une Mercedes dans le 10ᵉ arrondissement de Paris, puis sauvagement agressé par une dizaine d’individus et poignardé à plusieurs reprises. La voiture est retrouvée un jour plus tard, calcinée, dans un parking.
Au cœur de cette affaire, un règlement de comptes entre jeunes de la cité des Chaufourniers, surnommée «la cité rouge», et celle voisine de la Grange aux Belles, toutes deux situées dans les 10ᵉ et 19ᵉ arrondissements.
Plusieurs témoins ont pointé du doigt le rappeur MHD, de son vrai nom Mohamed Sylla, originaire des Chaufourniers. Les enquêteurs ont établi que la Mercedes incendiée lui appartenait, et des témoins l’ont affirmé avoir vu à bord.
Le rappeur nie catégoriquement avoir été sur les lieux du drame. De plus, une vidéo de la scène, prise par un témoin depuis un appartement, montre un homme noir aux cheveux teints en blond, vêtu d’un survêtement Puma. À l’époque, MHD avait les cheveux peroxydés et était l’ambassadeur de la marque de sportswear.
L’avocat général a souligné dans ses réquisitions que la position de MHD repose sur la rumeur propagée par les membres du groupe de la Grange aux Belles, affirmant : «Ce n’est pas par l’effet de la rumeur que la voiture de Mohamed Sylla a été identifiée comme celle de la commission des faits», en énumérant tous les éléments à charge contre le rappeur.
Pour les six coaccusés de MHD, le représentant du ministère public a requis des peines de treize à vingt ans de réclusion criminelle, avec la peine maximale pour l’un d’entre eux qui est en fuite et jugé par défaut. Son ADN a été retrouvé sur un couteau découvert sur la scène du crime.
En revanche, l’avocat général a plaidé pour l’acquittement de deux hommes : l’un, Wissem E., a été innocenté par les enquêteurs au cours des débats. Quant à Moussa K., il a estimé qu’il n’était «pas raisonnable» de le condamner, compte tenu des éléments avancés dans l’enquête pour l’incriminer.
Cette affaire a été marquée, tout au long des investigations et du procès, par la «loi du silence» observée par les accusés et de nombreux témoins. De nombreux d’entre eux, pourtant convoqués, ne se sont pas présentés à la barre, une omerta motivée par la «peur des représailles», selon plusieurs déclarations.
«Ce climat de terreur, cette loi du silence, on ne peut pas les accepter, vous ne pouvez pas les laisser gagner», a plaidé Juliette Chapelle, une des avocates de la famille de la victime, s’adressant à la cour.